Etre ou ne pas être assisté par un avocat pendant une instruction…

06/11/2012

Telle est la question implicitement posée au Conseil Constitutionnel par une question prioritaire de constitutionnalité (Q.P.C.), transmise le 18 septembre 2012 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation[1], elle-même saisie par une partie civile.

En effet, l’examen de la constitutionnalité de certaines restrictions apportées par la loi pénale aux droits des parties sans avocat – mis en examen et partie civile[2] – au cours d’une procédure d’instruction implique nécessairement de s’interroger sur la place de l’auxiliaire de justice qu’est l’avocat.

Ainsi, la présente Q.P.C. s’inscrit dans un courant déjà initié en 2011 visant à interroger les Sages de la rue Montpensier sur les droits réservées aux parties qui se défendent seules devant le juge d’instruction.

Gageons que ce courant ne se tarira pas avec la décision du Conseil Constitutionnel sur la présente question soumise, dans la mesure où la constitutionnalité d’autres textes du Code de procédure pénale pourrait être remise en cause par les justiciables, notamment celle de l’article 114 du Code de procédure pénale qui instaure un « filtre » dans la communication du dossier pénal, en la personne de l’avocat de la partie.

1.      La Q.P.C. soumise au Conseil Constitutionnel le 18 septembre 2012 

Initialement présentée par une partie civile (Mme M. !) à la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Versailles, ladite Q.P.C. est la suivante :

« L’article 161-1 alinéa 1[3] du code de procédure pénale porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au droit à un procès équitable et aux droits de la défense garantis par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, en ce qu’il réserve aux seules parties assistées par un avocat la possibilité de demander au juge d’instruction de modifier ou de compléter les questions posées à l’expert ou d’adjoindre à cet expert ou aux experts déjà désignés un expert de leur choix ? »

Après avoir constaté que cette disposition était applicable à la procédure, qu’elle n’avait pas été déclarée conforme à la Constitution auparavant, la Chambre criminelle considérait la question comme sérieuse « dès lors que l’impossibilité pour une partie non assistée d’un avocat de demander au juge de modifier ou de compléter les questions posées à l’expert ou d’adjoindre à cet expert ou aux experts déjà désignés un expert de leur choix est susceptible de porter atteinte aux principes constitutionnellement garantis du droit à un procès équitable et des droits de la défense ».

Elle était donc transmise au Palais Royal.

Derrière cette question s’en cache une autre, qui touche à la place de l’avocat dans la procédure d’instruction : est-il conforme aux principes constitutionnels que des mêmes droits et pouvoirs soient réservés à cet auxiliaire de justice et refusés à la partie elle-même ?

Il existe déjà un élément de réponse dans la jurisprudence du Conseil Constitutionnel.

2.      La décision du 9 septembre 2011

La question des droits réservés aux avocats, lors de l’information judiciaire, a déjà été posée au Conseil Constitutionnel le 15 juin 2011. La constitutionnalité de l’article 175 du Code de procédure pénale, telle qu’issu de la loi du 5 mars 2007, était alors soumise aux Juges.

Cet article, bien connu des praticiens du droit pénal, marque la fin de la phase d’enquête de l’information judiciaire, le juge considérant les investigations terminées et adressant alors aux parties et à leurs avocats un avis de fin d’inforrmation.

S’ouvrent alors deux délais successifs de durée plus ou moins longue selon que le mis en examen est ou non détenu.

Au cours du premier délai, les parties peuvent faire valoir leurs arguments tendant au renvoi de l’affaire devant la juridiction de jugement ou à l’abandon des poursuites et au non-lieu[4]. En particulier, le Procureur de la République est en principe tenu de prendre son réquisitoire définitif (acte contenant les arguments de l’accusation).

Au terme de ce premier délai, s’ouvre une seconde période permettant aux mêmes parties de répondre aux arguments déjà présentés.

L’économie de ce texte est donc, clairement, de permettre un échange écrit entre les intervenants au procès, afin que le juge d’instruction puisse statuer en parfaite connaissance de cause sur le sort du dossier. Celui-ci doit d’ailleurs explicitement faire référence aux éléments à charge et à décharge figurant dans son dossier lorsqu’il rédige son ordonnance de règlement.

L’objet de la Q.P.C. de juin 2011 était précisément d’inviter le Haut Conseil à se prononcer sur le fait que le réquisitoire définitif du Parquet n’était adressé qu’à l’avocat et non à la partie elle-même, en vertu de l’article litigieux.

Cette règle était-elle conforme au droit à un procès équitable et aux droits de la défense ?

Le 9 septembre 2011[5], le Conseil Constitutionnel rendait la décision suivante :

« 5. Considérant que les articles 80-2, 80-3 et 116 du code de procédure pénale garantissent le droit des personnes mises en examen et des parties civiles de bénéficier, au cours de l’instruction préparatoire, de l’assistance d’un avocat, le cas échéant commis d’office ; que, toutefois, dès lors qu’est reconnue aux parties la liberté de choisir d’être assistées d’un avocat ou de se défendre seules, le respect des principes du contradictoire et des droits de la défense interdit que le juge d’instruction puisse statuer sur le règlement de l’instruction sans que les demandes formées par le ministère public à l’issue de celle-ci aient été portées à la connaissance de toutes les parties ; que, dans la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 175 du code de procédure pénale, les mots : « avocats des » ont pour effet de réserver la notification des réquisitions définitives du ministère public aux avocats assistant les parties ; que, par suite, ils doivent être déclarés contraires à la Constitution ; »

*         *         *

A la seule lecture de cette décision, la cause de l’article 161-1 alinéa 1, actuellement en cours d’examen, semble être entendue, celui-ci étant voué à l’infamie de la déclaration d’inconstitutionnalité.

Pourtant, l’examen du commentaire[6] de la décision du 9 septembre 2011 peut laisser penser que la messe du Conseil n’est pas dite, celui-ci souhaitant manifestement trouver un équilibre entre plusieurs principes : le secret de l’instruction, le principe du contradictoire, les droits de la défense, le procès équitable (et à un moindre niveau le principe selon lequel les parties ne sont pas toutes dans une situation identique).

Un élément pourrait tout de même faire pencher la balance vers une future déclaration d’inconstitutionnalité : l’article 161-1 alinéa 1 à présent contesté, est issu de la loi du 5 mars 2007, dite loi « Outreau », comme l’article 175 partiellement censuré le 9 septembre 2011.

Or, l’un des buts de la loi du 5 mars 2007 était précisément de faire une place plus importante au principe du contradictoire tout au long de l’instruction, principe ayant notamment fondé la décision de censure de l’article 175 du Code de procédure pénale[7].

Saisi le 18 septembre 2012, le Conseil Constitutionnel devrait donc trancher au plus tard le 18 décembre prochain.

Si une décision de censure devait être rendue, la place de l’avocat dans l’instruction s’en trouverait une nouvelle fois affaiblie en même temps que ses prérogatives propres.

3.      Quel avenir pour l’avocat au cours d’une instruction ?

Il n’est pas impossible que le Conseil Constitutionnel soit prochainement saisi au sujet d’autres textes du Code de procédure pénale confiant la mise en œuvre d’un droit à l’avocat de la partie.

Ainsi :

–  l’article 82-2 prévoit qu’une partie peut demander qu’un acte d’instruction soit réalisé en présence de son avocat, sans qu’elle-même puisse y assister ;

–  l’article 114 du Code de procédure pénale prévoit que seul l’avocat peut consulter le dossier d’instruction et en obtenir copie ;

–  l’article 167 prévoit la remise à l’avocat seulement de la copie de l’intégralité des rapports d’expertise demandés par le magistrat instructeur ;

–  l’article 197 réserve aux seuls avocats la possibilité de consulter les dossiers devant la Chambre de l’instruction (cour d’appel des décisions du juge d’instruction).

Il existe un paradoxe, au moins apparent, dans ces différentes dispositions.

Le principe est clair : les parties au procès ont le choix de se défendre seules ou de recourir à l’assistance d’un avocat dans le cadre d’une information judiciaire.

En revanche, selon le choix effectué, leur statut sera certes le même mais leurs droits seront parfois différents dans leur mise en œuvre, puisque réservés au seul avocat.

Au travers de ces procédures, passée, présente et potentielles, est posée la question de la place de l’avocat aux côtés des parties au cours de l’instruction.

Surtout, le rôle de « filtre » de l’avocat dans l’accès au dossier pourrait être remis si l’article 114 du Code de procédure pénale – au moins de ses premiers alinéas[8] – venait à être un jour déclaré inconstitutionnel.

Pour l’heure, seul l’avocat peut consulter le dossier d’instruction et en obtenir la copie.

Si son client, partie au procès, peut ensuite consulter cette copie au cabinet de son conseil, il ne peut en principe en détenir lui-même un exemplaire, sauf à obtenir l’autorisation préalable du juge d’instruction et à s’engager auprès de lui à ne pas la diffuser auprès des tiers[9], sous peine d’amende.

De facto, une partie sans avocat n’a donc pas accès au dossier de la procédure et se trouve dans une situation inégale avec une partie assistée d’un conseil : elle ne peut tout simplement pas se défendre.

Cet état de fait, d’emblée discriminatoire, repose néanmoins sur la volonté de protéger l’enquête, par définition en cours lors de l’information judiciaire. Ici s’opposent donc deux principes : le secret de l’instruction contre les droits de la défense (dont bénéficient aussi la partie civile).

Précisément, l’article 114 réserve l’accès au dossier à l’avocat car, au regard du premier principe, son client et lui-même ne sont pas tenus aux mêmes obligations.

Rappelons que l’avocat n’est pas directement tenu de respecter le secret de l’instruction établi par l’article 11, alinéas 1 et 2, du Code de procédure pénale[10], dans la mesure où « il ne concourt pas à la procédure » au sens dudit article, selon la Chambre criminelle de la Cour de cassation[11].

Néanmoins, il est indirectement tenu de respecter ce principe aux termes de l’article 2 bis[12] du règlement intérieur national (R.I.N.) des avocats, sous peine de sanctions pénales et disciplinaires au titre de la violation du secret professionnel.

Au contraire, la partie elle-même, qu’elle soit mise en examen ou partie civile, n’est pas tenue de respecter ledit secret puisque, d’une part, elle ne concourt pas à la procédure et que, d’autre part, elle n’est tenue par aucune règle ordinale.

Une invalidation de l’article 114 (en tout ou en partie) pourrait donc porter une sérieuse atteinte au secret de l’instruction (déjà malmené de toutes parts).

Le Conseil irait-il jusque-là s’il était saisi de la question ?

Il est permis d’en douter, en particulier si l’on se réfère à l’arrêt Menet c. France,  rendu le 14 juin 2005 par la Cour européenne des Droits de l’Homme[13]. Dans cette espèce, la Cour avait considéré que le refus de donner accès au dossier d’instruction à une partie civile sans avocat ne constituait pas une « atteinte excessive à son droit à un procès équitable » (article 6 § 1), reconnaissant ainsi la prévalence du secret de l’instruction sur l’accès au dossier pour une partie civile[14].

Un bémol tout de même : la décision de la Cour européenne aurait-elle été la même si le requérant avait été un mis en examen sans avocat (ou un « accusé en matière pénale » selon la terminologie de la Convention européenne des Droits de l’Homme) ?

Rien n’est moins sûr…

En l’état du droit positif, le choix de ne pas prendre d’avocat, en particulier pour une partie civile, n’est donc pas sans conséquences pour l’exercice effectif de ses droits au cours d’une procédure d’instruction.

Une fois ce constat posé et en prenant en compte les principes constitutionnels parfois antagonistes dont le Conseil Constitutionnel doit assurer le respect, il paraît raisonnable de se poser la question suivante : l’avocat ne devrait-il pas être obligatoire tout au long de l’instruction ?

Le lecteur aura raison de penser que l’auteur « prêche pour sa paroisse ».

Mais au-delà de ces considérations, instaurer un ministère d’avocat obligatoire au cours de l’instruction permettrait de répondre aux questions soulevées et de faire cohabiter les différents principes constitutionnels évoqués.

Une telle réforme permettrait en outre à l’auxiliaire de justice qu’est l’avocat de prendre toute sa place auprès des justiciables confrontés à une procédure pénale parfois jugée froide, distante, voire incompréhensible.

En tout état de cause et en l’état du droit positif, l’on ne peut que conseiller à toute partie au procès pénal de se faire assister par un avocat pour pouvoir exercer pleinement ses droits.

[1] Cass. Crim., n° 12-90.046, 11 septembre 2012.

[2] Bien qu’aucun texte ne le prévoit, la Chambre criminelle de la Cour de cassation considère que le témoin assisté n’est pas une partie au procès. Celui-ci bénéficie tout de même de certains droits attachés à la qualité de partie au procès, énumérés au gré des différents articles du Code de procédure pénale.

[3] « Copie de la décision ordonnant une expertise est adressée sans délai au procureur de la République et aux avocats des parties, qui disposent d’un délai de dix jours pour demander au juge d’instruction, selon les modalités prévues par l’avant-dernier alinéa de l’article 81, de modifier ou de compléter les questions posées à l’expert ou d’adjoindre à l’expert ou aux experts déjà désignés un expert de leur choix figurant sur une des listes mentionnées à l’article 157 ».

[4] Par ailleurs, les mêmes parties peuvent présenter des demandes d’actes auprès du juge (auditions, confrontations, expertises…) et soulever des nullités de procédure.

[5] Décision n° 2011-160 QPC du 9 septembre 2011.

[6] http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/root/bank/download/2011160QPCccc_160qpc.pdf

[7] Commentaire de la décision n° 2011-160 QPC du 9 septembre 2011, page 8 :

« Dans la présente décision, s’agissant des garanties égales qui doivent être assurées à tous les justiciables, le Conseil Constitutionnel a particulièrement fondé sa décision sur les droits de la défense et le principe du contradictoire ».

[8] Article 114, alinéas 1 à 9, du Code de procédure pénale :

« Les parties ne peuvent être entendues, interrogées ou confrontées, à moins qu’elles n’y renoncent expressément, qu’en présence de leurs avocats ou ces derniers dûment appelés.

Les avocats sont convoqués au plus tard cinq jours ouvrables avant l’interrogatoire ou l’audition de la partie qu’ils assistent par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, télécopie avec récépissé ou verbalement avec émargement au dossier de la procédure.

La procédure est mise à leur disposition quatre jours ouvrables au plus tard avant chaque interrogatoire de la personne mise en examen ou chaque audition de la partie civile. Après la première comparution de la personne mise en examen ou la première audition de la partie civile, la procédure est également mise à tout moment à la disposition des avocats durant les jours ouvrables, sous réserve des exigences du bon fonctionnement du cabinet d’instruction.

Après la première comparution ou la première audition, les avocats des parties peuvent se faire délivrer, à leurs frais, copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier. Cette copie peut être adressée à l’avocat sous forme numérisée, le cas échéant par un moyen de télécommunication selon les modalités prévues à l’article 803-1. La délivrance de cette copie doit intervenir dans le mois qui suit la demande.

Les avocats peuvent transmettre une reproduction des copies ainsi obtenues à leur client. Celui-ci atteste au préalable, par écrit, avoir pris connaissance des dispositions de l’alinéa suivant et de l’article 114-1.

Seules les copies des rapports d’expertise peuvent être communiquées par les parties ou leurs avocats à des tiers pour les besoins de la défense.

L’avocat doit donner connaissance au juge d’instruction, par déclaration à son greffier ou par lettre ayant ce seul objet et adressée en recommandé avec accusé de réception, de la liste des pièces ou actes dont il souhaite remettre une reproduction à son client.

Le juge d’instruction dispose d’un délai de cinq jours ouvrables à compter de la réception de la demande pour s’opposer à la remise de tout ou partie de ces reproductions par une ordonnance spécialement motivée au regard des risques de pression sur les victimes, les personnes mises en examen, leurs avocats, les témoins, les enquêteurs, les experts ou toute autre personne concourant à la procédure.

Cette décision est notifiée par tout moyen et sans délai à l’avocat. A défaut de réponse du juge d’instruction notifiée dans le délai imparti, l’avocat peut communiquer à son client la reproduction des pièces ou actes dont il avait fourni la liste. Il peut, dans les deux jours de sa notification, déférer la décision du juge d’instruction au président de la chambre de l’instruction, qui statue dans un délai de cinq jours ouvrables par une décision écrite et motivée, non susceptible de recours. A défaut de réponse notifiée dans le délai imparti, l’avocat peut communiquer à son client la reproduction des pièces ou actes mentionnés sur la liste ».

[9] Article 114-1 du Code de procédure pénale :

« Sous réserve des dispositions du sixième alinéa de l’article 114, le fait, pour une partie à qui une reproduction des pièces ou actes d’une procédure d’instruction a été remise en application de cet article, de la diffuser auprès d’un tiers est puni de 3 750 euros d’amende ».

[10] Article 11 du Code de procédure pénale :

« Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète.

Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

Toutefois, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause ».

[11] Cass. Crim., 18 septembre 2001, Bull. crim. n° 179 ; Dr. pénal 2002, Comm. n° 16, obs. Maron – voir également Cass. Crim. 27 octobre 2004: Bull. crim. no 259.

[12] Article 2 bis du R.I.N. :

« L’avocat respecte le secret de l’enquête et de l’instruction en matière pénale, en s’abstenant de communiquer, sauf pour l’exercice des droits de la défense, des renseignements extraits du dossier, ou de publier des documents, pièces ou lettres intéressant une enquête ou une information en cours.

Il ne peut transmettre de copies de pièces ou actes du dossier de la procédure à son client ou à des tiers que dans les conditions prévues à l’article 114 du code de procédure   pénale ».

[13] Cet arrêt est d’ailleurs visé par le commentaire de la décision du Conseil Constitutionnel du 9 septembre 2011.

[14] Convention européenne des Droits de l’Homme, 2ème section, 14 juin 2005, n° 39553/02, affaire Menet c. France :

« 49. Toutefois, la Cour relève qu’en droit français, les accusés et les parties civiles, en tant que personnes privées, ne sont pas soumises au secret professionnel, à la différence des avocats. Or, le fait que l’accès au dossier de l’instruction est réservé aux avocats, soit directement, soit par leur intermédiaire, et qu’en conséquence le requérant n’a pu le consulter, découle précisément de la nécessité de préserver le caractère secret de l’instruction.

50. La Cour rappelle que le caractère secret de la procédure d’instruction peut se justifier par des raisons relatives à la protection de la vie privée des parties au procès et aux intérêts de la justice, au sens de la deuxième phrase de l’article 6 § 1 de la Convention et que, si cet article peut jouer un rôle avant la saisine du juge du fond, les modalités de son application durant l’instruction dépendent des particularités de la procédure et des circonstances de la cause (voir entre autres précédents, Ernst et autres c. Belgique, no 33400/96, § 68, 15 juillet 2003).

51. Finalement, la Cour relève que la présente affaire diffère de l’affaire Foucher précitée, d’une part parce qu’en l’espèce le requérant n’était pas « accusé en matière pénale » au sens de l’article 6 § 3 de la Convention, d’autre part parce que, dans l’affaire Foucher, la question de la protection du secret de l’instruction ne se posait pas (arrêt Foucher, § 35), l’intéressé ayant fait l’objet d’une citation directe devant la juridiction de jugement.

52. Eu égard à l’ensemble des circonstances et compte tenu des intérêts en jeu, la Cour estime que la restriction apportée aux droits du requérant n’a pas apporté une atteinte excessive à son droit à un procès équitable.

53. Partant, il n’y a pas eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ».