Les nouvelles lignes directrices relatives au contrôle des concentrations

12/08/2020 - corinne-khayat

L’Autorité de la concurrence a publié le 23 juillet 2020 ses nouvelles lignes directrices relatives au contrôle des concentrations[1].

Depuis 2017, l’Autorité a initié un travail de modernisation et de simplification du contrôle des concentrations, notamment avec l’ouverture d’une consultation publique organisée fin 2019[2].

Les nouvelles lignes directrices entrent en vigueur immédiatement et se substituent aux précédentes du 4 juillet 2013. Elles ont pour objectif de fournir aux entreprises un guide complet et clair concernant le champ d’application des règles relatives au contrôle national des concentrations, le déroulement de la procédure et les méthodes d’analyse au fond utilisées par l’Autorité.

Elles comportent des apports notables en matière de procédure (I), et intègrent les évolutions de la pratique décisionnelle depuis 2013 s’agissant de l’examen au fond d’une opération de 
concentration (II).

I. Sur les innovations procédurales

Demandée depuis des années par les praticiens, il est désormais possible pour les entreprises de formuler une demande de désignation d’un rapporteur en charge de l’examen du dossier (§188 à 190). À la suite de cette demande, l’Autorité communiquera dans un délai de cinq jours ouvrés le nom de l’adjoint au chef de service chargé de l’examen du dossier à la partie notifiante. En revanche, il est regrettable que le point de départ du délai de cinq jours n’ait été précisé, celui-ci devrait en tout état de cause commencer à courir à compter du jour où la demande de désignation a été adressée au service des concentrations. Il s’agit d’une procédure facultative.

Les lignes directrices prévoient en outre que l’Autorité informera les parties sur le caractère complet du dossier dans « un délai généralement de dix jours ouvrés après la notification » (§207). Il s’agit d’une avancée notable en ce qu’elle devrait mettre fin à la pratique qui consistait à recevoir l’accusé de complétude seulement peu de temps avant la décision de l’Autorité. Toutefois, compte tenu de la formulation retenue, il est regrettable que ce délai soit simplement indicatif et non contraignant.

Le champ d’application des opérations éligibles à la procédure simplifiée est étendu et clairement défini (§230).

À titre d’exemple, seront également éligibles :

  • les acquisitions de contrôle exclusif d’une entreprise lorsque l’acquéreur exerce un contrôle conjoint ;
  • la création d’une entreprise commune de plein exercice exclusivement active en dehors du territoire national ; et
  • l’opération concernant la prise de contrôle conjoint d’un actif immobilier en vente en l’état futur d’achèvement (VEFA).

L’Autorité s’engage à confirmer à la partie notifiante dans les dix jours ouvrés après la notification si l’opération est bien éligible à la procédure simplifiée (§232).

Les lignes directrices intègrent la procédure de notification dématérialisée (§234 à 240), déjà ouverte depuis 2019, pour (i) les opérations notifiées qui n’entrainent pas de changement d’enseigne du ou des magasins de commerce de détail concernés et (ii) les opérations qui ne se traduisent pas par un chevauchement d’activités entre les parties, qu’elles soient de nature horizontale, verticale ou conglomérale.

Il est à noter que la procédure simplifiée ainsi que la procédure dématérialisée concernent la plupart des opérations menées par des fonds d’investissement. En revanche, ne bénéficient pas de la procédure dématérialisée les fonds d’investissement détenant des participations contrôlantes dans des entreprises situées sur les mêmes marchés ou sur des marchés connexes ou reliés verticalement à ceux des actifs cibles
(§236).

II. Sur l’analyse au fond d’une opération de concentration

En ce qui concerne l’analyse des opérations, les lignes directrices intègrent en annexe des exemples issus de la pratique décisionnelle récente, notamment la consécration de la prise en compte des ventes en ligne dans le cadre de l’analyse des effets d’une opération de concentration[3]. L’Autorité dresse ainsi une liste d’indices pour apprécier la substituabilité entre les ventes en ligne et les ventes en magasin physique
(§838 à 841).

En outre, l’Autorité détaille l’analyse locale réalisée dans les concentrations dans le secteur du commerce de détail (§822 à 837).

Les lignes directrices indiquent également que, pour la délimitation des marchés, l’Autorité pourra étendre la dimension temporelle dans laquelle se place son analyse prospective afin de tenir compte « des évolutions en cours ou anticipées à un horizon raisonnable, qui dépend des spécificités du secteur » (§518).

Les mesures correctives susceptibles d’être adoptées dans le cadre du contrôle des concentrations (§351 et s.) et leurs conditions de révision (§442 et s.) font désormais l’objet d’un développement plus complet.

Enfin, de nouveaux modèles d’engagement structurel et de contrat de mandat, à jour des évolutions récentes, sont communiqués en annexes de même que des précisions sur les demandes de documents internes susceptibles d’être formulée par l’Autorité en cours d’instruction.

Par Corinne Khayat avec l’assistance d’Ophélie Sommé, stagiaire-avocat.



[1] Lignes directrices 2020 relatives au contrôle des concentrations.

[2] Communiqué de presse du 16 septembre 2019.

[3] Décision 16-DCC-111 du 27 juillet 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de Darty par la Fnac.