Conséquences du Brexit sur vos marques au Royaume-Uni : vade-mecum

19/01/2021

Le Brexit a été acté le 31 décembre dernier par la publication au Journal officiel de l’Union Européenne de l’Accord de commerce et de coopération entre l’Union Européenne et la Communauté Européenne de l’Energie Atomique, d’une part, et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, d’autre part, entré en vigueur de façon provisoire au 1er janvier 2020.

Soucieux de l’impact d’un tel accord sur vos intérêts commerciaux et en particulier sur vos marques déposées au Royaume-Uni et en Irlande du Nord, le Cabinet UGGC Avocats vous prie de bien vouloir trouver ci-après un guide pratique vous permettant de prendre toutes mesures pour sécuriser vos marques post-Brexit.

Il convient de noter à titre liminaire qu’aux termes de l’article IP.4 de l’Accord de commerce précité, le Royaume-Uni a réaffirmé son engagement de respecter divers accords internationaux afférant à la propriété intellectuelle, y compris :

  • Le protocole de Madrid concernant l’enregistrement international des marques ;
  • Les traités de Genève et de Singapour sur le droit des marques.

Les articles IP.18 et suivants de l’Accord de commerce comprennent en outre diverses stipulations ayant vocation à préserver la substance du droit des marques jusqu’alors en vigueur au Royaume-Uni et en Irlande du Nord et son harmonisation avec le droit de l’Union Européenne, s’agissant des points suivants :

  • l’utilisation de la classification de Nice (article IP.18) ;
  • la définition des signes susceptibles de constituer une marque (article IP.19) ;
  • les droits conférés par la marque (article IP.20) ;
  • la procédure d’enregistrement des marques (article IP.21) ;
  • la protection des marques notoires (article IP.22) ;
  • les exceptions aux droits conférés par une marque (article IP.23) ;
  • les causes de déchéance d’une marque (article IP.24) ;
  • le droit d’interdire, à certaines conditions, l’apposition d’une marque sur un conditionnement ou une étiquette (article IP.25) ;
  • et les demandes d’enregistrement déposées de mauvaise foi (article IP.26).

Nonobstant l’avènement du Brexit, les règles juridiques afférant à l’ensemble de ces éléments devraient donc en substance être maintenues.

Vade-mecum du titulaire ou déposant de marques visant le Royaume-Uni post-Brexit :

  • 1ère étape : Faire le point sur vos marques susceptibles d’être affectées par le Brexit.

Nous nous permettons de vous rappeler que le Brexit est susceptible d’affecter divers types de marques en vigueur au Royaume-Uni :

  1. Marques nationales britanniques ou « UK trademark » et marques internationales désignant le Royaume-Uni ;
  2. Marques internationales désignant l’Union Européenne ;
  3. Marques de l’Union Européenne.
  • 2ème étape : Identifier vos UK trademark et marques internationales désignant le Royaume-Uni.

Le Brexit n’a pas d’incidence majeure sur la validité de ces marques, qui demeurent en principe en vigueur selon des règles juridiques substantiellement identiques à celles s’appliquant antérieurement au Brexit, comme exposé précédemment.

  • 3ème étape : Identifier vos marques internationales désignant l’Union Européenne, enregistrées au 1er janvier 2021. Être attentif à la création d’une marque « doublon » britannique.

L’Accord de retrait prévoit que « Le Royaume-Uni prend des mesures pour que les personnes physiques ou morales qui ont obtenu une protection avant [le 1er janvier 2021] pour des [marques enregistrés] au niveau international désignant l’Union conformément au système de Madrid […], bénéficient d’une protection au Royaume-Uni pour leurs marques […] au regard de ces enregistrements internationaux. »[1]

Selon les guidelines du gouvernement britannique, nouvellement publiées, toute marque internationale en vigueur désignant l’Union Européenne selon le Protocole de Madrid ne sera plus protégée au Royaume-Uni à compter du 1er janvier 2021.

Une marque britannique comparable sera toutefois créée au Royaume-Uni – cette marque sera susceptible d’être assignée, licenciée, renouvelée séparément de la marque internationale de l’Union Européenne préexistante, de laquelle elle sera entièrement autonome.

Toute marque internationale désignant l’Union Européenne dont vous seriez titulaire au 1er janvier 2021 sera donc doublée d’une marque équivalente au Royaume-Uni. Il conviendra d’être attentif à l’exploitation et au renouvellement de chacune de ces deux marques désormais distinctes.

  • 4ème étape : Identifier vos marques de l’Union Européenne, enregistrées au 1er janvier 2021. Être attentif à la création d’une marque « doublon » britannique.

L’Accord de retrait prévoit que le titulaire d’une marque de l’Union Européenne enregistrée antérieurement au 1er janvier 2021 devient, sans réexamen, titulaire d’une marque au Royaume-Uni, constituée du même signe, pour les mêmes produits ou services[2].

Toute marque de l’Union Européenne dont vous seriez titulaire au 1er janvier 2021 sera donc doublée d’une marque équivalente au Royaume-Uni. Il conviendra d’être attentif à l’exploitation et au renouvellement de chacune de ces deux marques désormais distinctes.

  • 5ème étape : Identifier vos marques de l’Union Européenne, en cours de dépôt au Royaume-Uni au 1er janvier 2021. Les redéposer au Royaume-Uni si vous souhaitez y obtenir protection.

L’Accord de retrait prévoit qu’une marque de l’Union Européenne ayant fait l’objet d’un dépôt avant le 1er janvier 2021, mais non encore enregistrée, ne bénéficie pas d’une protection automatique au Royaume-Uni.

Dans le cas où vous souhaiteriez obtenir la protection sur le territoire britannique d’une marque de l’Union Européenne en cours de dépôt au 1er janvier 2021, nous vous invitons donc à initier un dépôt distinct devant l’UKIPO. Ce nouveau dépôt fera l’objet d’un examen complet et sera soumis au paiement des taxes de dépôt nationales britanniques.[3]

Il convient de noter à ce titre que la marque britannique ainsi déposée acquerra la date de dépôt de la marque de l’Union Européenne en cours d’enregistrement dont elle est le pendant, à condition d’être déposée auprès de l’UKIPO dans les neuf (9) mois suivant la date de dépôt de la marque de l’Union Européenne auprès de l’EUIPO (droit de priorité).

Le délai d’enregistrement des marques de l’Union Européenne étant long, il convient de considérer que toute marque de l’Union Européenne récemment déposée devra faire l’objet d’un second dépôt national pour être protégée au Royaume-Uni.

  • 6ème étape : Si vous êtes ressortissant du Royaume-Uni ou de l’Irlande du Nord : Désigner un représentant européen pour la gestion de vos marques dans l’Union Européenne.

Aux termes de l’Accord commercial précité, « seuls sont autorisés à représenter une personne physique ou morale devant l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle les juristes qualifiés dans l’un des États membres de l’EEE et établis dans l’EEE, s’ils sont habilités dans ledit État membre à agir en qualité de représentant en matière de marques ou de propriété industrielle, et les mandataires agréés dont les noms figurent sur la liste tenue à cet effet par l’Office. »

Au titre de ces stipulations, tout ressortissant britannique possédant des marques de l’Union Européenne devra donc désormais, dans ses rapports avec l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle, désigner un juriste européen ou un mandataire agréé afin d’assurer sa représentation.

  • 6ème étape bis : Si vous êtes ressortissant de l’Union Européenne : Désigner un représentant britannique pour la gestion de vos marques au Royaume-Uni.

De façon corollaire, en tant que ressortissant de l’Union Européenne, il vous faudrait désormais désigner un représentant britannique pour vous représenter au Royaume-Uni devant les offices compétents.

  • 7ème étape : Mettre à jour votre portefeuille de marques.

Cette étape est cruciale pour déterminer vos marques en vigueur au Royaume-Uni au 1er janvier 2021, et celles devant faire l’objet d’un nouveau dépôt. Elle vous permettra plus généralement d’intégrer dans un document unique l’ensemble des conséquences du Brexit sur vos marques, telles que précédemment évoquées.

  • 8ème étape : Mettre à jour tout contrat notamment de licence conclu s’agissant des marques précitées.

Nous attirons votre attention sur la nécessité de mettre à jour, le cas échéant par voie d’avenant, les contrats en particulier de licence conclus s’agissant des marques précitées, dans le cas notamment où vous souhaiteriez continuer de les exploiter sur le territoire du Royaume-Uni, afin que ces contrats incluent désormais dans leur champ d’application les « doublons » précités.

Le Cabinet et son équipe d’Avocats spécialisés en propriété intellectuelle sont naturellement à votre disposition pour vous assister dans l’ensemble de ces démarches. 

Par l’équipe IP-IT pour le Cabinet UGGC Avocats

Source : Eurlex

UGGC - Article uggc ip it brexit
Corinne Khayat, Anne-Marie Pecoraro

[1] Accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique publié le 12 novembre 2019, article 56.

[2] Accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique publié le 12 novembre 2019, article 54.1, a.

[3] Accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique publié le 12 novembre 2019, article 59.1.