Employeurs : Anticipez le sujet de la consultation préalable du Comité Social et Economique, avant le déploiement (même en phase pilote) de vos logiciels intégrant l’IA !
Le 14 février 2025, le Tribunal judiciaire de Nanterre a rendu une ordonnance de référé en matière d’obligation d’information et de consultation du Comité Social et Economique (CSE) à l’occasion du déploiement en phase pilote d’applications informatiques mettant en œuvre des solutions d’intelligence artificielle (IA).
Celle-ci a le mérite d’apporter une précision sur la temporalité de la consultation du CSE en matière d’IA, un sujet encore mal appréhendé socialement bien que pourtant inévitable compte tenu de son essor en entreprise.
Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, l’employeur doit informer et consulter le CSE sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise et notamment sur « l’introduction de nouvelles technologies, tout aménagement important modifiant (…) les conditions de travail » (Article L. 2312-8 du code du travail) ; Une consultation pouvant d’ailleurs donner lieu à la désignation d’un expert habilité sur le fondement de l’article L. 2315-94 du code du travail.
Même si les arrêts ne sont pas encore légion, c’est sur la base de ce fondement juridique et des décisions éparses rendues en première instance que nous avons dès l’origine conseillé à nos clients d’informer et de consulter le CSE avant toute implémentation pratique de solutions (logiciels/applications) d’IA en entreprise.
L’objectif est de favoriser les relations sociales et de s’éviter le risque d’une suspension sous astreinte de l’intégration de ces solutions, voire d’un délit d’entrave, compte tenu du flou textuel et de l’absence de réelle matière jurisprudentielle !
Une position que vient confirmer et étayer l’ordonnance de référé du 14 février 2025 du Tribunal judiciaire de Nanterre. Ainsi, la « phase pilote » de déploiement d’une série d’application d’IA excède la simple expérimentation et donc le simple projet dès lors que cette phase implique leur utilisation, même partielle, par l’ensemble du personnel concerné.
Cette ordonnance n’est pas si surprenante puisque la procédure d’information et de consultation doit s’effectuer avant toute mise en œuvre du projet pour respecter le principe de l’effet utile de la consultation du CSE.
Elle interroge toutefois sur la nécessité d’une consultation lors d’une simple phase de test très restreinte, puisque le Tribunal judiciaire de Nanterre semble ne l’imposer que dès les premières expérimentations concrètes.
Les employeurs sont donc appelés à la plus grande prudence, même pendant les phases de test de leur application d’IA, et doivent garder à l’esprit que leur mise en œuvre concrète peut être retardée d’un voire deux mois en cas d’expertise, le temps de l’information et de la consultation du CSE.
Tribunal judiciaire de Nanterre, Ord. Réf. 2025, n° 24/01457
Max Mietkiewicz
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