Lutter contre la discrimination et le harcèlement sur le lieu de travail : Responsabilités essentielles de l’employeur
Ces dernières années, un mouvement de plus en plus important s'est développé pour dénoncer la discrimination et le harcèlement sur le lieu de travail. Ce problème, malheureusement omniprésent dans divers secteurs, a incité le Défenseur des droits en France à émettre une série de 49 recommandations clés dans une décision-cadre du 5 février 2025, détaillant la manière dont les employeurs devraient mener des enquêtes internes lorsqu'ils sont confrontés à de tels incidents.
Contexte
Cet appel à l’action s’inscrit dans un contexte où l’on parle de plus en plus de ces comportements graves, mais où le cadre juridique reste vague. Si le code du travail énonce des principes fondamentaux, il ne contient pas de lignes directrices clairement définies, ce qui peut laisser les employeurs et les employés dans l’incertitude lorsque des incidents réels se produisent.
Principes fondamentaux pour les employeurs
L’obligation première des employeurs est de protéger la santé physique et mentale de leurs employés. Cet engagement comprend
- Interdiction et prévention : Le lieu de travail doit être exempt d’actes de harcèlement et de discrimination. Les employeurs sont tenus de mettre en œuvre des mesures préventives et de communiquer clairement sur ces questions, en les intégrant dans le règlement du lieu de travail.
- Réponse immédiate : Dès qu’il a connaissance d’un cas de harcèlement ou de discrimination, l’employeur doit prendre des mesures pour enquêter sur les allégations, évaluer leur validité et, le cas échéant, mettre en œuvre des mesures correctives.
Un texte législatif important, l’accord national interprofessionnel du 23 juillet 2010 sur le harcèlement moral et la violence au travail, souligne la nécessité pour les employeurs de mettre en place des procédures solides pour traiter rapidement les plaintes.
La nécessité des enquêtes internes
En cas d’allégations, les enquêtes internes ne sont pas simplement une bonne pratique ; elles peuvent être une nécessité légale dans des circonstances spécifiques, telles qu’un danger grave et imminent pour les employés. En 2019, la jurisprudence a renforcé le fait que l’absence d’enquête interne, même si le harcèlement n’est pas avéré, peut constituer une violation de l’obligation de prévenir les risques au travail.
Cependant, un récent arrêt de juin 2024 conduit à considérer que si les enquêtes internes ne sont pas toujours obligatoires, elles restent l’un des moyens les plus efficaces pour un employeur de remplir ses obligations en matière de santé et de sécurité.
Les défis des enquêtes internes
Malgré ce paysage juridique, l’exécution des enquêtes internes reste très ambiguë. Il existe un besoin évident de pratiques normalisées, car la manière dont les enquêtes sont menées varie considérablement d’une organisation à l’autre.
En tant que praticiens, nous observons deux problèmes principaux :
- La diversité des pratiques entraîne un manque de confiance entre les victimes et les témoins, ce qui fait que de nombreuses situations qui mériteraient d’être signalées ne le sont pas.
- La variabilité du traitement des enquêtes peut nuire à la crédibilité et à l’efficacité de la réponse ; en fin de compte, la responsabilité des employeurs est en jeu.
Importance des recommandations du Défenseur
Les recommandations du Défenseur des droits constituent un guide essentiel pour les employeurs afin de naviguer dans ce paysage complexe. Bien que l’ouverture d’une enquête interne n’exonère pas l’employeur de sa responsabilité, le respect de ces lignes directrices contribuera à garantir la conformité aux bonnes pratiques.
Les employeurs qui ont déjà mis en place des processus trouveront probablement que bon nombre de ces recommandations s’alignent sur les stratégies existantes. Toutefois, des détails mineurs mais essentiels, tels que l’accusé de réception des plaintes, peuvent améliorer de manière significative la communication et la confiance.
En outre, les recommandations visant à garantir des enquêtes rapides, des équipes pluridisciplinaires et la possibilité d’externaliser les enquêtes si nécessaire ajoutent de la robustesse aux procédures.
Conclusion : Accepter le changement
Les employeurs sont encouragés à considérer ces recommandations non pas comme des fardeaux, mais comme des occasions d’améliorer la culture du lieu de travail, de lutter efficacement contre la discrimination et le harcèlement et de protéger les droits de tous les salariés. Pour ceux qui n’ont pas encore mis en place de processus, ces lignes directrices fournissent un cadre complet, tandis que les organisations établies devraient envisager d’aligner leurs pratiques sur ces recommandations pour garantir la conformité et promouvoir un environnement de travail sûr.
En s’engageant à respecter ces pratiques, les employeurs peuvent favoriser un environnement dans lequel tous les employés se sentent habilités à s’exprimer et à voir leurs griefs traités de manière juste et efficace.
Décision-cadre 2025-019 du 5 février 2025 relative aux recommandations générales aux employeurs publics et privés concernant les enquêtes internes menées à la suite de signalements de discrimination
Max Mietkiewicz
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