Twitter contraint de communiquer les données d’identification d’un compte anonyme ayant diffusé un tweet contenant des informations personnelles sur un homme politique

08/03/2021

Lors des élections européennes de 2019, l’ancien secrétaire général du parti Debout la France,  constate que des échanges privés avec des cadres de son parti et des photographies personnelles sont diffusés sur Twitter par un compte anonyme.

Il porte plainte pour (i) manœuvres susceptibles d’influencer le vote électoral, (ii) violation du secret de la vie privée, et (iii) atteinte au secret des correspondances, notamment celles avec son avocat.

Le 16 juillet 2019, le secrétaire général, le président,  et d’autres cadres de Debout la France assignent en référé les sociétés Twitter France et Twitter International Company.

Par ordonnance contradictoire du 30 octobre 2019, le juge des référés du Tribunal judiciaire de Paris (i) met la société Twitter France hors de cause mais (ii) ordonne à Twitter International de communiquer au demandeur l’email associé au compte litigieux et le numéro de téléphone, l’adresse IP correspondant à l’utilisation de ce compte, mais également le nom des comptes Twitter qui ont rediffusé un ou plusieurs tweets du compte en cause ainsi que les emails, téléphones, adresses IP liées à ces comptes.

Le 5 février 2020, Twitter fait appel de cette ordonnance.

Dans son arrêt du 10 février 2021, la Cour d’appel de Paris relève que les demandes des requérants sont fondées sur l’article 145 du Code de procédure civile[1] et confirme  la présence d’un motif légitime pour solliciter la mesure d’instruction in futurum.

En effet,dès lors que la société Twitter International n’a pas contesté la mesure ordonnée à l’encontre du titulaire du compte Twitter litigieux, elle reconnaît l’existence d’un procès en germe non manifestement voué à l’échec sur le fondement (i) de la faute civile en raison du caractère diffamatoire des tweets relevé par le premier juge et (ii) du délit de l’article 226-15 du Code pénal[2].

S’agissant des personnes ayant retweeté les publications litigieuses, ou les ayant transférées avec la mention « j’aime », le litige potentiel les concernant n’est manifestement pas voué à l’échec non plus, sur le fondement d’une faute civile à raison de leur caractère diffamatoire.

Ensuite, la Cour d’appel estime que la demande de communication du nom des comptes Twitter qui ont rediffusé des tweets du compte anonyme, ainsi que les données associées n’excède pas les mesures d’instruction admissibles au sens de l’article 145 du Code de procédure civile dès lors que son champ d’investigation est limité aux seuls comptes Twitter ayant rediffusé les messages litigieux provenant d’un compte Twitter qui n’a fonctionné qu’un mois.

Pour finir, la Cour d’appel estime que la société Twitter International ne justifie pas des raisons pour lesquelles elle ne serait pas en mesure de communiquer les numéros de téléphone des utilisateurs de Twitter visés par la mesure d’instruction.

En tout état de cause, la Cour d’appel de Paris confirme l’ordonnance du juge des référés dans toutes ses dispositions.

Le Cabinet UGGC Avocats et son équipe spécialisée en affaires publiques et dans la défense des droits de la personnalité et de la vie privée se tiennent à votre disposition pour toute question que vous pourriez avoir à ce sujet.

Par l’équipe IP/IT du Cabinet UGGC Avocats

Références de l’arrêt : Cour d’appel, Paris, (Pôle 1 – ch. 3), 10 février 2021, Sté Twitter International Company c/ Jean-Philippe T, RG n°19/57685

Sources : Capital

UGGC - Twitter

[1] Article 145 du Code de procédure civile : « S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».

[2] Article 226-15 du Code pénal : « Le fait, commis de mauvaise foi, d’ouvrir, de supprimer, de retarder ou de détourner des correspondances arrivées ou non à destination et adressées à des tiers, ou d’en prendre frauduleusement connaissance, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

 Est puni des mêmes peines le fait, commis de mauvaise foi, d’intercepter, de détourner, d’utiliser ou de divulguer des correspondances émises, transmises ou reçues par la  (L. no 2011-525 du 17 mai 2011, art. 150-2o)  «voie électronique» ou de procéder à l’installation d’appareils  (L. no 2013-1168 du 18 déc. 2013, art. 23)  «de nature à permettre la réalisation» de telles interceptions. — V.  Arr. du 4 juill. 2012 ss. art. R. 226-1.

  (L. no 2020-936 du 30 juill. 2020, art. 18)  «Lorsqu’ils sont commis par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, ces faits sont punis d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 60 000 euros d’amende.»